lundi 29 octobre 2007

Véronique entre bonheur et exigence

Véronique Loisel clôt la seconde étape de la Transat 6,50 Charente-Maritime / Bahia à la 19ème place. La navigatrice qui porte les couleurs de l’Essonne, est arrivée cette nuit au Brésil, dans la baie de Salvador de Bahia avec un large sourire et le sentiment d’une mission ou plutôt d’un rêve accompli en solitaire. Portée par un département entier, de nombreux jeunes, supporters et collègues de travail, l’ingénieur d’Arianespace termine 18ème de l’épreuve au classement général des voiliers de série.

Une longue seconde étape

C’est fait ! Véronique aura passé plus de 20 jours en Mer, seule sur son petit voilier de 6m50 lors de cette seconde étape entre Funchal et le Brésil. 3100 milles en solitaire, le passage de l’archipel de Cap Vert poussé par les alizés du Nord-Est, le pot au noir qui aura fait des siennes pendant plus d’une semaine avec des changements de force et de direction du vent à répétition, le franchissement de l’Equateur pour enfin glisser dans les Alizés du Sud-Est vers le but final : Salvador de Bahia, la baie des Saints !

18ème en 29 jours 8 heures 43 minutes et 16 secondes, Véronique Loisel, quelques heures seulement après avoir posé pied à terre, oscille encore entre doute, satisfaction et déception. Son esprit cartésien en lutte avec ses émotions dissèque avec lucidité les manques, les insuffisances et les réussites aussi qui ont scandé sa transat. "Je m'en veux de mes erreurs, et je me réjouis des ressources que j'ai su trouver en moi pour m'en sortir." Bagarreuse, accroc à la compétition, Véronique s'était lors de la première étape entre la Rochelle et Madère, muée naturellement dans la peau de la « régatière » tueuse. La seconde étape, émaillée de difficultés et d'impondérables imprévisibles, lui a parfois rogné les ailes. Le pot au noir, en libérant plus tôt qu'elle même ses concurrents les plus directs, a exacerbé son envie d'en découdre ; "mais l'absence de positions et de classements quotidiens m'a de manière pernicieuse petit à petit déconnectée de cette quête à la place. Lorsque l'on ne sait plus si l'on a gagné ou perdu de milles durant les dernières heures, on baisse inconsciemment le pied. Non pas que l'on ne fasse plus marcher le bateau, mais l'agressivité n'est plus la même. Durant la première étape, j'ai tenu longtemps des spis jusqu'à la limite. Après l'équateur, je n'étais plus aussi enclin à prendre ce genre de risque." Reste l'aventure humaine, avec ce grand voyage tout en introspection. « Je n'irai pas jusqu'à dire que j'ai fait le point sur ma vie mais j'ai beaucoup pensé à mon parcours, personnel et professionnel, aux gens qui m'entourent et qui ont marqué ma vie... " Autant d'émotions plus ou moins bien cernées et que Véronique, incorrigible rationnelle, va dans les tout prochains jours tenter d'exprimer par écrit, non pour savoir ce qui a changé en elle, mais pour donner corps et consistance à des pensées que l'éloignement et la solitude ont enrichies. Marin appliqué, Véronique s'est aussi découverte avec l'adversité des capacités à réagir, à relativiser qu'elle tient à appliquer dès que possible dans le montage d'un nouveau projet...

Une première étape rondement menée

Partie le 16 septembre de La Rochelle, Véronique Loisel avait réalisé une très belle première étape. Les premières 24 heures, l’Essonnienne a même effectué la meilleure moyenne avec 102,6 milles parcourus. Ensuite, la descente vers le cap Finisterre, malgré quelques problèmes de pilote automatique, a été expresse pour Loisel. Bonne gestion du sommeil, une alimentation rythmée et une bonne trajectoire météorologique ont permis à la navigatrice amateur de tirer toute la quintessence de son voilier de série « de l’Espace pour la Mer ». La navigation le long des côtes Espagnoles puis vers Funchal, l’une des îles de l’archipel de Madère aura été en tout point idyllique. « C’était vraiment un long surf qui nous a amené à Madère. Je n’avais jamais connu autant de portant » déclarait d’ailleurs Véronique à l’arrivée de la première étape à la 10ème place en 18 heures 24 minutes et 46 secondes à simplement 8 heures de Stéphane Le Diraison. La suite de l’aventure, nous la connaissons.

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En parallèle de son projet sportif, Véronique a tenu à partager son aventure. Les jeunes Essonniens ont, ainsi, suivi la transat 6,50 de Véronique chaque jour en classe. Deux balises Argos ont d’ailleurs été jetées en mer afin que les jeunes suivent leur évolution et analysent les données océanographiques via les satellites. Le confinement à bord et de nombreux autres sujets ont été aussi au cœur du projet « de l’espace pour la mer ». Véronique s’est d’ailleurs attelée lors de l’escale à Funchal à répondre par écrit et en images vidéo aux nombreuses questions des enfants, collègues, supporters ou amis.

La fin de l’aventure ?

Le déclic s’est produit à la fin de l’année 2005. A la vue d’un mini 6,50, Véronique, qui avait déjà beaucoup navigué notamment en croisière, s’est alors décidée à entrer dans le grand bain du circuit 6,50. Elle achète un Pogo 2, celui de Olivier Avram, ministe confirmé. 2006 sera la saison d’apprentissage de cette petite coque de noix. Véronique qui travaille chez Arianespace la semaine à Evry et souvent en mission en Guyane, partira à Lorient tous les week-end pour naviguer. Sa qualification hors course sera un moment très important pour l’Essonnienne. Privée d’électronique, Véronique se bat pendant 1000 milles dans des conditions chaotiques. Cette année, Véronique confirme ses capacités dans le gros temps en terminant cinquième d’une transgascogne dantesque. Avec cette belle 18ème place à la transat 6,50, Véronique démontre qu’elle peut, tout à fait, imaginer naviguer à haut niveau en 6,50.

Tanguy Blondel – Denis van den Brink