Un nouveau défi

Après sa participation à la Mini Transat en 2007 avec un voilier de série, Véronique poursuit l’aventure en 6,50 en achetant un voilier prototype le n°429, baptisé Cupuaçu, du nom d’un fuit de la Guyane. Il a été dessiné par Marc Lombard et Eric Levet, architectes de nombreux voiliers 60 pieds qui ont participé au Vendée Globe. De nombreuses innovations de la course au large ont été testées sur les prototypes 6,50 (quille pendulaire et bout dehors inventés par Michel Desjoyeaux, les dérives latérales, les doubles safrans, etc.). Cupuaçu est construit en carbone afin d’obtenir une coque rigide, robuste et légère.
Entretien avec Eric Levet, architecte
Cupuaçu
est un voilier prototype : quelles sont ses caractéristiques propres,
qu’est ce que tu as privilégié dans le dessin, ses points forts …
Ce
Cupuaçu, ex Dingui, est un prototype 6.50 qui a été conçu au cabinet
Lombard pendant l’hiver 2002-2003 pour un jeune skipper suédois Eskil
Degsell. Il est une évolution du dessin de Sampaquita n°240 (dessiné en
1997 pour Lionel Lemonchois). Il a été construit par AMCO, l’orfèvre
Thierry Fagnent. Mis à l’eau tardivement au printemps 2003, il n’a
malheureusement pas été qualifié pour participer à la transat 2003. Et
il ne s’est pas beaucoup confronté à la concurrence du moment. Par
rapport au n°240, nous avions cherché des gains de performance sur toute
la polaire, avec un bateau à la fois plus puissant (stabilité de forme,
largeur au dessus de la flottaison) et plus léger et plus toilé.
A
l’époque le carbone n’était pas autorisé pour les mats. Nous avions
passé une bonne partie de l’étude sur le gréement aluminium, 3 étages de
barre de flèches ( !), pour qu’il puisse tenir les charges induites par
le Code 0. La quille carbone, réalisée elle aussi par AMCO, sur moule
femelle fraisée 3D, représenta une bonne partie des études. Ce bateau
fit « causer » dans le monde du 6.50, car c’était le premier proto 6,50 à
quille basculante construit par Thierry Fagnent, et le bateau le plus
« propre » du circuit.
Nous
étions confiant dans son potentiel par rapport à la concurrence de
l’époque, mais ce n’est qu’en 2005 que nous avons vraiment su que ce
bateau était bien né, quand Alex Pella, le nouveau propriétaire et
skipper, gagna presque toutes les courses en méditerranée. Puis il fini
2ième de la transat 2005, en gagnant la grande étape à Bahia.Justement
qu’est ce qui pourrait l’avantager par rapport à la dernière génération
des prototypes : polyvalence, moins de réglages, etc.
A
chaque nouvelle étude de prototype, on cherche évidement à faire mieux
que le bateau précédant, et les 624-716 sont meilleurs que ce 429. Mais
il possède l’avantage d’être parfaitement au point, et de ne pas avoir
de gros trous sur la polaire. C’est un bateau polyvalent, mais qui est
moins puissant que la dernière génération 2007-2008, et un peu plus
lourd aussi. On peut dire qu’il est un peu plus simple d’utilisation que
les 624-716 (mais c’est très relatif sur un 6.50 ou il y a toujours
beaucoup de choses à faire…) dans la mesure ou il n’y a pas de ballast
d’inertie, contrairement à la dernière génération.
Quelles
sont tes sensations à la barre ? alors que tu as dessiné bon nombre de
voiliers, pourquoi es-tu si attaché à celui-ci au point d'avoir failli
le racheter !
Les
sensations à la barre sont très bonnes comme souvent sur plan Lombard
( !..). Naviguer en 6.50 au portant dans 15-20nds de vent, procure des
sensations qui sont assez terribles. Ce sont les seuls bateaux de course
au large qui offrent ce genre de plaisir à la barre ! Alors voila,
forcement, imaginer filer bon train sous code5, cap vers Bahia, ça fait
rêver… je savais que Alex Pella allait vendre le bateau après la transat
2007, et puis je me suis fais souffler l’achat par une certaine
Véronique…
Le cabinet Lombard, Eric Levet, 3ème en partant de la gauche
Visite guidée du Mini Prototype Cupuaçu
Une équation bien complexe que d’optimiser un prototype qui, l'année de sa conception en 2003, était au top 5 des Minis ! L’idée, c'était de trouver le meilleur compromis entre le gain de poids, la fiabilité, le budget, le timing avant la mise à l'eau, et le respect du calendrier des qualifications.
Au cours de l'hiver 2010, avec l'aide de l’architecte du voilier, chaque élément du bord a été repensé avec l’objectif de le rendre plus léger, plus toilé, plus performant. Véronique a suivi la réalisation des travaux avec la rigueur et l’investissement personnels qui la caractérisent. Doté d’un mât de nouvelle génération, d’un bulbe de quille plus léger et plus hydrodynamique, d’un plan de pont optimum, le voilier est désormais taillé à la mesure de la navigatrice, dont l'impatience est grande d'entrer en course.
L'objectif : être en symbiose avec son voilier pour sa course phare, Les Sables-les Açores-Les Sables, au mois d’août 2010.
Coup
de zoom sur les prototypes
Depuis 1977, les prototypes ont évolué pour devenir
aujourd'hui de véritables machines de course surtoilées, capables de tenir un
cap au près pointu et d´offrir des sensations au portant dignes de luges
surpuissantes. Affichant 50 m2
au près et pour Cupuaçu plus de 140
m2 au portant, les prototypes cherchent avant tout à gagner
en poids tout en concentrant le maximum de lest dans les fonds et dans le
bulbe. Centrer les poids et les descendre, augmenter la surface de voilure tout
en diminuant la surface mouillée et en préservant un plan anti-dérive performant… Belle
équation à multiples entrées.
Toujours est-il que les Minis sont un formidable
terrain de jeu pour les architectes ou les marins qui fabriquent eux-mêmes
leurs jouets. Du côté des innovations, rappelons tout de même que les Minis ont
contribué à l´adoption des quilles pendulaires, des
ballasts (réserves d´eau faisant contrepoids d´un côté ou de l´autre du
bateau), des dérives latérales (afin d´optimiser le plan anti-dérive), des
doubles safrans, des bout-dehors pour l´utilisation des genakers et autres spis
asymétriques, des grand-voiles à corne…
Procédé
de fabrication
Les procédés de fabrication sont sous haute
surveillance pour gagner du poids. Si, pour les bateaux de série, le
stratifié-verre-polyester reste la référence du moment compte tenu de sa
parfaite maîtrise, de sa facilité de travail et de son coût maîtrisé, c'est le
sandwich carbone époxy qui est a été choisi pour la construction de Cupuaçu en
2003. Un choix logique car le carbone s'est imposé au fil des années comme la
solution-miracle pour offrir à la fois rigidité, robustesse et légèreté. Ainsi,
le carbone est aujourd'hui décliné sous toutes les formes à bord et ce, du mât
(cuit dans un four autoclave photo ci dessus chantier Heole) à la coque, en passant par les safrans, les cloisons sans oublier les 2
dérives, le bout-dehors, la bôme…Le but du jeu est bien évidemment
d'offrir la coque la plus légère possible avec le maximum du poids efficace
concentré dans le bulbe de la quille.
Venez-donc visiter mon voilier De l’espace pour
la mer.
Caractéristiques
Nom de baptême : Cupuaçu
Nom de course : De l'espace pour la mer
N° de course : 429
Port d'attache : Lorient
Longueur : 6,50 m
Largeur : 3 m
Tirant d'eau : 2 m
Poids total : environ 825 kg
Poids du bulbe de la quille : environ 330 kg
Hauteur du mât : 12 m
Architectes
Coque et appendice : Marc Lombard Architecte Navale (Mar Lombard et Eric Levet)
Mât : Marc Lombard Architecte Navale (Eric Levet)
Construction
Bateau : AMCO (Thierry Fagnent) à SaintPhilibert (56)
Mât : HEOL Composites (Laurent Tournier)
Année de construction : 2003
Coque en carbone Bisafran
Quille pendulaire (bulbe 2010)
Mât en carbone (2010)
Source d'énergie : 2 panneaux solaires (en redondance) et pile à combustible (en nominal)
Voiles : All Purpose (Rémi Aubrun)
Surface Grand-Voile : 29,22 m²
Surface Solent : 19,15 m²
Surface Genaker : 24 m²
Surface code 5 : 24 m²
Surface spi médium : 68,45 m²
Surface spi maxi : 90,27 m²
Décoration : O douce (Jean-Baptiste Epron)