mardi 4 septembre 2007

Mini Fastnet : un avant goût du large (Juin 2006)

Avec presque une centaine de bateaux sur la ligne de départ, jamais la Mini-Fastnet pourtant à sa 21ème édition, n’avait connu pareille affluence. Le prologue organisé la veille décore la baie de Douarnenez des couleurs de 12 nationalités différentes. Oyapock s’offre une belle 12ème place, derrière « Orange», le temps pour son équipage de prendre ses marques. La brise thermique qui souffle (14 nœuds d’ouest) ne laisse pas encore présager de la bulle anticyclonique qui s’installe alors en mer d’Irlande.

Ce sont 200 marins qui s’élancent le lendemain midi au près et tentent d’appliquer au mieux les principes de Bernouilli, les théories du Bernot et les entrées des routeurs auxquels les plus préparés ont eu affaire avant d’embarquer. C’est notre cas, nous bénéficions des dernières analyses de« fameux » météorologues, spécialistes de la course au large: la difficulté réside principalement dans l’évitement de la zone sans vent située au centre de cette zone de haute pression. Nos routeurs s’accordent à dire qu’il faudra contourner la zone par le sud. Jusqu’au phare de Wolf Rock situé entre les îles Scily et l’Angleterre, nous sommes du bon côté du plan d'eau. Le grand genaker en stormlite que nous envoyons si tôt l’Angleterre passée nous fait légèrement abattre vers notre option sud et nous avançons plus vite que ceux qui s’acharnent à faire du près. Ceux-là ont choisi la route directe pour le Fastnet, ils ont en réalité bien raison ! Les pressions relevées au baromètre montent anormalement dès le lendemain soir, nous espérons secrètement que les autres sont encore plus empétolés que nous … Mais les positions des conccurents passés en route directe et relevées à 8 heures du matin par VHF nous en dissuadent. Malgré le suivi attentif des bulletins météo de France Inter et des gardes côtes anglais, la «fameuse» bascule à gauche que nous attendons sous 24 heures et qui doit nous permettre de réaliser le « coup de la cuillère » ne pointe pas.

Enfin le vent reprend doucement à l’approche du Fastnet, c’est l’occasion de doubler un concurrent en orchestrant un bel empannage sous spi et en rasant l’ombre noire du phare dans la lumière violette de l’aurore. Après avoir mis 24h à parcourir les 50 derniers milles, nous entamons la descente sous un nouveau jour. Le système météo que nous touchons est bien différent de l’aller : une zone dépressionnaire centrée sur le Golfe de Gascogne lève une houle rapidement désordonnée et la mer devient vite mauvaise. A la VHF, nous comprenons que 3 de nos conccurents ont dématé, ils se détournent vers l’Irlande sous gréement de fortune. Même si nous sommes trempés, la descente est beaucoup plus facile, on peut enfin jouer avec le vent! Il n’y a guère qu’au passage des rails d’Ouessant que le ventre tombe avec l’arrivée de la brume. A bord, on reste très vigilant en guidant Oyapock au son des cornes de brume des cargos… Bientôt le fond de la baie de Douarnenez apparaît. Notre périple a duré 6 jours et 7 heures, soit 24h de plus que le peloton de tête passé en route directe.

Conclusion :

- Par rapport au solitaire, la gestion du bord en double permet de mieux exploiter le potentiel du voilier.

- Par très petit temps, le pilote électrique barre bien mieux qu’un équipier fatigué.

- Toujours vérifier les vivres avant le départ ! Responsable de l’avitaillement, mon équipier, pourtant très efficace, en a oublié la moitié, et nous avons du nous rationner en partageant les derniers lyophilisés.

-A notre retour, un spécialiste de Météo France nous a expliqué que le déplacement des anticyclones est aléatoire et imprévisible, la prévision des vents reste donc peu fiable à l’approche de leurs centres.

Moralité : Dans l'anticyclone, faire la route directe et laisser les autres prendre des risques !